Version française / RECHERCHES
Lire, Commenter, Réécrire
À L'AUBE DE LA MODERNITÉ
Responsables : Mathieu de La Gorce et Sylvie Robic, avec Guillaume Peureux
Les recherches engagées par l’équipe LCR suivent pour fil directeur la question de la représentation, ou des traces de l’actualité dans les textes de la première modernité. Après un programme consacré à la pratique des commentaires contemporains, puis un programme traitant des enjeux liés à l’urgence dans cette période, le programme débuté en septembre 2023 a pour objet de questionnement la figuration des personnes en position de subordination, en particulier dans le cadre d’une domination sociale, dans les textes du Moyen Âge au XVIIIe siècle. Ce projet fait écho à la volonté constante qui anime l’équipe d’envisager les phénomènes d’écriture dans la première modernité à rebours d’une lecture figeant leur production dans un caractère intemporel ; il rejoint le choix de se centrer sur la part circonstancielle et liée à l’actualité des faits littéraires, mais en prenant cette fois en compte une dimension plus politique et sociale de ces circonstances. Tout en conservant un esprit similaire et une même volonté de travailler en commun, le projet réoriente donc la perspective qui était la nôtre jusqu’à lors ; il résonne avec les ambitions du CSLF d’intégrer les apports des sciences humaines à ses recherches pour renouveler les approches de la littérature des siècles anciens. La tradition de l’Histoire saisie « from below » selon l’expression de E. P. Thompson, et qui s’est accompagnée d’un essor des subaltern studies, constitue un point d’ancrage méthodologique à partir duquel penser ou repenser une manière d’observer et d’analyser d’un point de vue littéraire ces types de représentations, les imaginaires qui y sont associés et les enjeux qui s’y attachent dans les productions écrites de la première modernité.
Si l’intérêt majeur n’est probablement plus de défaire des stéréotypes qui reposent sur les biais des traitements historique comme historiographique, ces derniers ayant déjà été très largement étudiés et commentés par les historiens, il demeure cependant que les études proprement littéraires qui se sont penchées sur ces figures pour les siècles anciens ne sont pas si nombreuses. On pense ainsi réfléchir à ces profils liés à la marginalité ou à toute forme d’infériorité, non pour en dresser une histoire, mais pour tenter d’appréhender des modalités de leur présence en littérature, les traces qu’ils y ont laissées, le sens qu’il faut accorder à la distance focale avec laquelle ils sont représentés, au premier ou à l’arrière-plan, ou même leur absence et les raisons potentielles de cet effacement.
En confrontant leurs objets d’étude, ils et elles voudraient étudier les formes que prennent ces liens de subordination dans la littérature de la première modernité : peut-on percevoir des formes d’homogénéité de ces profils, ou encore des schémas d’évolution de leurs représentations ? Des liens complexes entre pouvoir et savoir, pouvoir et écriture, gouvernent les représentations et guident les imaginaires : de telles figures mineures peuvent-elles émerger et faire entendre leurs voix dans la production écrite ? De quelle façon et comment ont-elles été perçues alors et comment le sont-elles aujourd’hui ? À quels stéréotypes ou à quels types d’imaginaires obéissent-elles ? De tels stéréotypes assignent-ils à ces figures une place qui conforte le modèle de domination ? Y a-t-il des voies littéraires pour s’en affranchir ?
Responsables : Mathieu de La Gorce et Sylvie Robic, avec Guillaume Peureux
Pierre Eskrich, gravure pour Gabriel Chappuys, Figures de la Bible declarees par stances,
éd. 1582, f° 52, détail (Bnf - Gallica)
Mis à jour le 27 septembre 2025