Publié le 1 juillet 2013–Mis à jour le 15 mai 2017
Paris, Les Prairies Ordinaires, coll. « Singulières modernités », 2013, 183 p.
Fantômas ! Le nom du « Génie du crime » a traversé tout le XXe siècle. À bien des égards, Pierre Souvestre et Marcel Allain ont enfanté en 1911 une œuvre monstre. Fantômas, revers obscur et grimaçant de notre monde, y invente, page après page, une violence sans visage, sans motivations et sans signification apparente. La série des Fantômas a fasciné les avant-gardes des années 1920-1930, qui en ont loué le génie créatif et la puissance subversive. Le mythe du criminel voleur d’identités, tueur cruel, virtuose de la mise en scène morbide, a inspiré tableaux, films expérimentaux, textes poétiques et polémiques. Nourri par un travail de collecte inédit, cet ouvrage propose de relire Fantômas à la lumière des travaux qui ont questionné la place des fictions dans les sociétés contemporaines. La trajectoire du protagoniste éclaire l’organisation du champ littéraire, partagé entre littérature légitime et productions de grande consommation. Consacrant la toute-puissance de l’information et des faits divers, l’œuvre apparaît bien comme « l’Énéide des temps modernes », selon la formule de Blaise Cendrars. La modernité du XXe siècle naissant y est, il est vrai, partout : grands magasins, chirurgie plastique, nouvelles techniques policières… En subvertissant les logiques classiques du detective novel où la raison et la progression de l’enquête priment sur le crime, Fantômas questionne les identités sociales, le maintien de l’Ordre et la répression des pulsions.